synthèse mis à jour le
31 décembre 2003 |
Le savon
Quelques éléments de compréhension sur la fabrication et le mode d’action du savon. |
L’origine du savon n’est pas très bien déterminée, toujours est-il qu’à toutes les époques (au moins depuis l’antiquité), on utilisait des produits pour se laver à base d’huile végétale ou de graisse animale et de cendres. Jusqu’à l’air industrielle, ils ont été les principaux constituants du savon. Les recettes se sont la plupart du temps transmises oralement et on n’en connaît pas bien le détail. Elles étaient mises au point par l’expérience et donnaient des résultats très variables. Avec les découvertes de la chimie, la fabrication du savon s’est rationalisée.
Pour la fabrication domestique du savon, c’est bien entendu l’expérience qui prévaut mais quelques connaissances de chimie peuvent permettre d’éviter quelques écueils et de parvenir à un résultat probant plus rapidement (d’autant plus que la transmission orale du savoir de nos aïeux s’est grandement perdue avec l’autoritarisme de la science).
Les savons sont des mélanges d’ions carboxylates et de cations métalliques (ions sodium ou potassium).
L’ion carboxylate est un agent tensio-actif qui abaisse la tension superficielle de l’eau (pour plus d’explications, voir -chimie et lavage-, c’est un détergent. Il assure le lavage grâce à 4 qualités :
L’eau savonneuse peut pénétrer les petits interstices de la surface en contact (donc les fibres du linge, l’assiette, la table, la peau…) plus efficacement que l’eau.
Les ions carboxylates s’agglutinent autour de la saleté et s’immiscent entre celle-ci et la surface en contact jusqu’à isoler la saleté de cette surface. Ils forment des micelles [1] englobant de petites particules de saleté. Les ions carboxylates ont une extrémité lipophile [2] et sont donc particulièrement efficace sur les corps gras.
De par les propriétés des ions carboxylates et la structure des micelles, celles-ci se repoussent l’une l’autre et elles se retrouvent donc dispersées dans l’eau savonneuse.
Il se forme un film d’ions carboxylate à la surface de l’eau de tension superficielle faible. Par agitation de l’eau savonneuse, des bulles d’air peuvent alors être emprisonnées. La mousse n’intervient pas en tant que telle dans le lavage mais est un indicateur de la tension superficielle du liquide et donc de son pouvoir détergent.
La saponification est la réaction d’un triglycéride (corps gras) avec des ions hydroxydes (apportés par un alcali tel la potasse ou la soude) pour donner un ion carboxylate (le savon) et du glycérol (appelé aussi glycérine) :
Soit, concrètement :
Cette réaction est lente (voire très lente) mais totale, c’est-à-dire qu’elle ne s’arrête que quand l’un des réactifs (le corps gras ou l’alcali) vient à manquer. Il est possible d’accélérer la réaction en agissant sur divers paramètres :
L’eau doit être la plus pure possible. Une eau salée, acide ou trop minérale n’est pas favorable à la saponification. L’eau de pluie ou une eau de source non minérale sont les plus appropriées.
Le corps gras est traditionnellement constitué d’huile végétale ou de graisse animale. Il influe sur la consistance finale du savon. Les huiles produisent des savons mous voire liquide, les graisses produisent plutôt des savons durs (la graisse de bœuf donne un savon plus dur que la graisse de mouton). Parfois, le corps gras était extrait des restes de nourriture accumulés pendant l’hiver.
L’alcali est une lessive de soude, qui produit un savon dur, ou de potasse, qui produit un savon mou. La soude ne se trouve que très rarement à l’état naturel, celle que l’on trouve dans le commerce est le résultat de processus industriels polluants. On préfèrera donc utiliser une lessive de potasse obtenue par infusion de cendres dans l’eau. La qualité de la cendre influe sur le résultat. Il faut des cendres très blanches (obtenues par une combustion à haute température). Les cendres de coque de noix, de chêne ou, pour un savon très blanc, de pommier sont les plus appropriées. De la cendre tout venant finement tamisée fait, par ailleurs, très bien l’affaire. La lessive de potasse est très corrosive et doit être manipulée avec grande précaution pour éviter les brûlures.
Des additifs divers et variés sont utilisés pour modifier les qualités du savon ou pour faciliter la réaction. Ainsi l’ajout de sel en fin de réaction permet d’obtenir un savon dur avec la lessive de cendres, l’alcool permet d’accélérer la réaction et rend le savon transparent (notamment la vodka), l’ajout d’acide lactique produit des « savons acides » moins agressifs pour l’épiderme. On trouve également dans les additifs du lait, du petit-lait, du miel, de la résine de pin, de la cire d’abeille…
Quelque soit le procédé utilisé, la fabrication du savon est une activité à risque : tant que le savon n’a pas « pris », la lessive puis le mélange sont hautement corrosifs et peuvent produire de graves brûlures. En cas de contact avec le corps, il faut rincer abondamment à l’eau.
La principale difficulté dans la fabrication du savon est le dosage des différents ingrédients, surtout quand on utilise de la lessive de cendres dont on ne connaît pas la concentration en potasse. Quelques repères peuvent nous guider mais rien ne remplace l’expérience.
Il existe différents procédés, en voici les principes de base :
Les recettes familiales actuelles proposent un dosage précis des différents ingrédients (malheureusement le plus souvent à base de soude). Elles définissent alors une température précise (comprise généralement entre 40 et 70°C) pour le corps gras d’une part et l’alcali d’autre part. Les deux solutions sont alors mélangées soit d’un coup, soit progressivement, en mélangeant jusqu’à l’obtention d’un mélange crémeux qui est ensuite versé dans les moules.
Le savon de Marseille est composé de soude et d’huile d’olive.
Sur un fond de savon provenant d’une cuve précédente et à ébullition, on envoie en même temps et à débit mesuré le corps gras et la soude de telle façon que la réaction de saponification se fasse au fur et à mesure. Quand la cuve est pleine, on la vide en laissant un fond de cuve et on recommence. Ce procédé est essentiellement industriel.
L’eau savonneuse est un milieu basique (ou alcalin), le savon est peu efficace dans une eau acide.
Il se dissout mal dans l’eau salée et est donc inutilisable dans l’eau de mer.
Une eau dure est une eau riche en minéraux : calcium et magnésium. Ils se combinent avec les ions carboxylates pour former des savons de calcium et magnésium insolubles dans l’eau. Les polyphosphates fixent les ions calcium ; incorporés aux lessives, ils en améliorent l’efficacité en eau dure mais ils sont corrosifs et hautement polluants pour l’eau.
Il est plus efficace dans l’eau chaude qui facilite l’action des ions carboxylates.
Même si elle est réalisée artisanalement, la fabrication du savon n’est pas sans impact sur l’être humain et la nature : bien qu’elle soit pratiquée depuis des millénaires, c’est déjà de la chimie !
La lessive de soude est à éviter dans la mesure où elle émane d’un processus industriel polluant. Mais la fabrication artisanale de la lessive de potasse n’est pas sans conséquences : elle consiste à concentrer fortement la potasse, substance hautement corrosive qui produit de graves brûlures. Cette lessive est un produit polluant qu’il faut manier avec précaution. Lors de la saponification, elle est transformée et le savon n’est plus aussi corrosif. Il faut cependant prendre garde que si l’on met trop de lessive par rapport au corps gras, le savon obtenu et le liquide résiduel contiendront encore beaucoup de potasse et seront très corrosifs. En cas de doute, il vaut mieux diluer à grande eau avant de déverser dans la nature ou les tuyauteries.
Pour accélérer la réaction, le mélange est chauffé et porté à ébullition parfois pendant plusieurs heures (jusqu’à 6 à 8 heures pour les méthodes traditionnelles !). Il est donc indispensable de mettre au point des méthodes avec un chauffage minimal ou même sans chauffage quitte à obtenir une réaction lente, ou d’envisager l’utilisation d’une parabole ou d’une cuisinière solaire.
Il faut toujours veiller à l’utilisation que le savon obtenu ne soit pas trop corrosif, il faut donc l’utiliser avec précaution. Si le savon est gras, il n’y a pas de risque mais il lavera moins bien.
Le savon n’est pas un produit naturel, il est le résultat d’un processus chimique que l’on provoque. Bien qu’il soit biodégradable et plus satisfaisant que les détergents dits de synthèse, il reste un détergent chimique à utiliser avec retenue.
Il existe des substances naturelles détergentes telles la saponine contenue dans la saponaire, le lierre ou le marron d’inde qui se substituent au savon dans certaines utilisations. L’argile permet de laver le linge, le fiel de bœuf est un excellent détachant…
Une bonne alternative au savon est également le développement de pratiques qui en limitent l’utilisation (vaisselle préalablement essuyée et rincée à l’eau, trempage du linge…)
opéra savon
http://operasavon.free.fr/historique.htm
un site consacré au savon.
chimie et lavage
http://www.ac-nancy-metz.fr/enseign/physique/Nouvprog/
prem_L/docs/chim_cuisine/Chimie&lavage-CH.pdf
un document expliquant simplement le mode d’action des détergents (agents tensio-actifs, tension superficielle...).
the soap factory - history (en anglais)
http://www.alcasoft.com/soapfact/history.html
une page d’un site commercial qui retrace l’utilisation du savon et sa fabrication à travers les âges.
artisanat pour tous - savon traditionnel
http://www.chez.com/siubhan/recette/savon.htm
des recettes de savons.